Addis Abeba, 4h30 du matin

C’est de Mesqel Square (Place de la Croix) que partent tous les cars qui quadrillent l’Ethiopie. Il a beau être 5h du matin, la foule est au rendez-vous et nous nous frayons un chemin vers le bon bus, celui qui nous mènera à Bahir Dar.

Dix heures de route à travers l’Ethiopie des montagnes en perspective ; puis 2h de route en minibus pour rallier Débré Tabor, ma ville d’adoption. Qu’est-ce qu’on attend ?

DebreTabor_mapFond de carte : www.terredafrique.com

Le soleil se lève quand nous quittons enfin Addis, les monts alentours plongés dans la brume. Il est 6h : le chauffeur lance la musique éthiopienne à fond. Impossible d’y échapper : les hauts parleurs sont partout et nous y aurons droit tout le voyage. Amateurs de silence, passez votre chemin !

Nous traversons d’immenses étendues mêlant pâturages et cultures. Sur les pentes, d’ingénieuses terrasses permettent d’exploiter chaque parcelle de terrain. La traversée des différents villages que nous croisons oblige notre chauffeur à klaxonner furieusement pour que les passants, les troupeaux de vaches ou de moutons, les charrettes tirées par des ânes ou les chiens s’écartent.

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Deux habitations traditionnelles : la maison en torchis et le toukoul

Le paysage est très vert, découpé en parcelles et bosquets d’arbres. Plusieurs fois, nous frôlons des voitures ou des cars venant en sens inverse de si près qu’il est préférable de fermer les yeux plutôt que de regarder. Les accidents de la route sont un fléau en Ethiopie : nous croisons un camion renversé, le cockpit broyé, transportant de nombreux pots de peinture qui se déversent tout autour. Plus loin, une jeep a heurté un camion transportant du bois et a fini dans le fossé. Effrayant de voir à quel point tout peut basculer en un instant.

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A 9h passée, la télévision du bus diffuse mon premier drama éthiopien. En amharique bien sûr ! Toute une histoire !

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Puis, sans qu’aucun signe ne le laisse entrevoir, nous entrons dans les gorges.

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Les falaises montent au-dessus de nous et les virages s’enchaînent, le vide nous restant caché par un brouillard à couper au couteau. Des chutes de couleur ocre se jettent des hauteurs. La pluie forcit, rendant la descente plus dangereuse encore. Quand enfin la brume s’évanouit, je distingue le Nil Bleu qui a creusé la pierre et coule au fond des gorges.

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En cette fin de saison des pluies, le débit est stupéfiant ! Deux ponts le traversent : à leur approche, nous croisons plusieurs groupes de babouins se tenant au pied des falaises.

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La route remonte et nous laissons le Nil derrière nous pour retrouver les terrasses où est principalement cultivé du sorgho. S’ensuivent de gigantesques plaines où les champs s’étendent à perte de vue.

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L’heure est au labour : les hommes utilisent l’araire, tirée par deux bœufs. Les ânes deviennent omniprésents, chargés de toute sorte de chargements. Et toujours, autant de monde à pied, la plupart pieds nus.

Bientôt, le paysage change de nouveau : après les montagnes et terrasses, les gorges, les immenses plaines, nous entrons dans une portion de forêt avec de majestueux acacias – celle-là même qui occupait tout le pays il fut un temps. Les cultures l’ont grignotée de manière exponentielle : la forêt ne représente plus que 4% du territoire aujourd’hui !

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Après la pause déjeuner à Débré Markos, notre chauffeur passe son temps à klaxonner sur tout ce qui passe devant lui, s’imposant sur la route. Le klaxon doit retentir à peu près toutes les deux minutes ! Absolument infernal ! Comme nous sommes assis devant, le bruit est total – sans compter que nous voyons tout ce qui se passe. Les femmes qui portent de lourdes charges sur leur dos, les enfants qui guident les troupeaux, les charrettes chargées de bois qui avancent sur un tiers de la route. Et les bajajs, ces petits taxis bleus à trois roues qui roulent dans tous les sens à l’approche des villes.

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Les ânes restent les plus dangereux : si moutons, chèvres, chiens s’effacent au son du klaxon, les ânes sont les seuls à rester sur place ou tracer leur toute comme si de rien n’était. Plusieurs fois, nous frôlons voitures et animaux – un chien finira sous nos roues, un âne sera heurté violemment également. Sans compter les hyènes écrasées sur le bitume…

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Au bout de huit heures de route, la pluie s’abat sur nous. Des rigoles ont été creusées le long de la route mais l’averse est si forte que l’eau bondit hors des tranchées et se déversent sur le bitume, charriant avec elle la terre ocre.

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Enfin, nous atteignons Bahir Dar, non sans soulagement. Plus de klaxon dans les oreilles ! Nous nous rendons à la gare routière pour prendre le minibus pour Débré Tabor. A peine arrivés que nous sommes assaillis par des dizaines d’hommes cherchant à nous convaincre de monter dans leur minibus. Pris à la gorge littéralement ! Très impressionnant ! Nous chargeons les valises dans un minibus qui s’élance aussitôt que nous sommes à bord. A l’ouest, le lac Tana s’étend paisiblement, des îles apparaissant à l’horizon.

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Deux heures de route, nous allons grimper à 2600m !

Ultime surprise du paysage : nous pénétrons dans une immense étendue… de rizières. Des rizières en Ethiopie ! Qui l’aurait cru ? Des hommes et femmes courbées s’appliquent à cultiver le précieux grain blanc.

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Nous entamons la montée. Entrée dans Alem Saga, une réserve où 500 hectares de forêt sont protégés. La nature sauvage ! Magnifique ! De quoi faire de belles randonnées, à moins de 10km de Débré Tabor. La campagne s’étend tout autour.

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Enfin, nous entrons dans la ville. Here we are !